"Cette culture (de l'érotisme) de l'ère Showa est balayée, maintenant que le Japon est tenu de se conformer à des normes mondiales", explique l'artiste.
Une exposition érotique, dans le quartier branché de Shibuya, à Tokyo, revendique la défense d'un art japonais du sexe décomplexé, qui serait, selon son commissaire, en voie de disparition, laminé par une uniformisation venue d'ailleurs.
Préserver pour la postérité
Dans une galerie de ce bouillonnant lieu de la mode, couverte pour l'occasion d'affiches érotiques ou de photos des lits les plus fous des "love hotels" de l'archipel, Kyoichi Tsuzuki, commissaire d'"Erotopia Japan", explique sa préoccupation. "Cette culture de l'ère Showa (1926-1989) est balayée, maintenant que le Japon est tenu de se conformer à des normes mondiales", affirme-t-il. "Peut-être n'arriverons-nous pas à l'empêcher d'être définitivement tuée mais nous pouvons la préserver pour la postérité", dit-il au milieu de mannequins et moulages grandeur nature de femmes nues, certaines attachées par des cordes, le visage marqué par un cri d'effroi.
Différent de la croyance chrétienne
"La culture du sexe est complètement différente en Occident et en Asie", selon Tsuzuki. "Vous voyez des musées érotiques en Europe, dans des villes comme Paris ou Amsterdam, mais ils adoptent souvent un point de vue intellectuel", estime cet homme corpulent, vêtu d'un T-shirt et coiffé d'une casquette de baseball portée visière contre la nuque. "Au Japon, l'art érotique a un côté humoristique, il est coquin et est destiné à faire rire", commente Kyoichi Tsuzuki. "C'est totalement différent de la croyance chrétienne selon laquelle le sexe est en quelque sorte un péché", assure-t-il.
Une exposition davantage prisée des femmes
Des fêtes traditionnelles au Japon voient des familles entières, des petits enfants aux grands parents, défiler au côté de statues géantes de phallus pour rendre hommage à la fertilité. Des dizaines de milliers de personnes assistent ainsi chaque printemps à Kawasaki, localité résidentielle limitrophe de Tokyo, au festival du pénis d'acier, où sont mis en vente divers objets phalliques: porte-clés, chocolats... Mais les musées du sexe qui parsemaient autrefois les campagnes ont peu à peu disparu. "Le but de cette exposition est de rappeler aux Japonais cette culture", dit Kyoichi Tsuzuki, "nous en avons perdu conscience". Plus de femmes que d'hommes visitent l'exposition, constate son commissaire. "Les hommes ont tendance à être intimidés et ils partent rapidement", dit-il. "On voit plus de femmes et elles s'attardent davantage".
Avec Europe1 - Crédit Photo: TORU YAMANAKA / AFP
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